Paris, 10 déc 2024 (AFP) - Un gaz plus cher qu'aux États-Unis, une électricité plus onéreuse qu'en Chine: l'industrie en Europe, en perte de compétitivité, est pénalisée par des prix de l'énergie beaucoup plus élevés qu'ailleurs, a alerté le patron de l'Agence internationale de l'Energie.
"Le prix du gaz naturel en Europe est cinq fois plus élevé que celui des États-Unis et le prix de l'électricité en Europe est trois fois plus élevé qu'en Chine", a déclaré le directeur exécutif de l'AIE, Fatih Birol, au colloque de l'Union française de l'électricité (UFE).
"Comment les fabricants européens, en particulier ceux pour lesquels le coût de l'énergie représente une part importante de leur coût global, peuvent rivaliser avec les autres pays?", a-t-il poursuivi.
"L'industrie européenne, ou plus précisément l'industrie manufacturière, entre dans une période décisive qui pourrait avoir des conséquences importantes pour l'économie européenne, le poids de l'Europe dans les affaires étrangères et la sécurité de l'Europe", a souligné le Dr Birol.
En matière de "technologies propres" (panneaux solaires, éolien, batteries, électrolyseurs), "l'Europe est nettement en retard par rapport à de nombreuses autres puissances économiques telles que la Chine, les États-Unis et, dans certains cas, même l'Inde et d'autres pays", a expliqué le patron de l'Agence de l'énergie de l'OCDE en évoquant aussi la difficulté pour l'UE d'avoir "une stratégie claire".
"L'Europe doit se pencher d'urgence sur ces questions et élaborer un nouveau plan directeur pour l'industrie", a-t-il ajouté, en écho au rapport de l'ancien Premier ministre italien et ex-président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, sur la perte de compétitivité de l'industrie européenne.
Pour Fatih Birol, il faut notamment s'interroger sur le soutien aux "industries existantes, le fer, l'acier, la pétrochimie, l'aluminium" et la façon de "combler l'écart de coût entre elles et leurs concurrents".
"Il est peut-être nécessaire d'avoir une politique commerciale plus musclée de l'Europe", a-t-il aussi indiqué.
Selon le patron de l'AIE, l'Europe a commis "trois erreurs stratégiques" par le passé: une trop grande dépendance au gaz russe, un désintérêt pour l'énergie nucléaire, et l'abandon du solaire, qui a finalement profité à la Chine.
"La Chine fabrique aujourd'hui 80% des panneaux solaires, il y a 20 ans, la France était le leader" grâce à une politique de subventions, a rappelé Fatih Birol.