L’approvisionnement en gaz naturel est un enjeu stratégique des États et des entreprises. En 2023, cette source d’énergie représentait 18 % de la consommation finale en France. C’est aussi la principale forme d’énergie utilisée par l’industrie. Dans un contexte de tensions politiques, d’incertitudes économiques, de volatilité des prix, de baisse des réserves et de transition énergétique, les pays doivent s’adapter pour garantir leur sécurité énergétique.
Où en est l’approvisionnement en gaz naturel en France et dans le monde ?
Quelles sont les stratégies mises en place pour limiter les risques et anticiper l’avenir ?
Quelles sont les perspectives pour l’approvisionnement en gaz à court et moyen terme ?
Panorama.
Quelle est la situation actuelle de l’approvisionnement en gaz naturel ?
L’approvisionnement en gaz naturel en France
Une consommation nationale de gaz en baisse
Depuis 2020, la consommation de gaz naturel en France suit une courbe descendante. En 2023, elle a atteint un niveau historiquement bas avec 417 TWh consommés, tous secteurs confondus. Cette baisse s’est confirmée en 2024. Au second semestre, le gestionnaire de réseau de transport GRTgaz note une diminution de 24,1 % de la consommation nationale par rapport à 2018/2019.
Cette baisse s’explique par la hausse des prix de l’énergie, la réduction du recours aux centrales électriques au gaz et la prise de conscience environnementale.
Un approvisionnement en gaz naturel sécurisé
Aucun risque ne semble aujourd’hui peser sur l’approvisionnement en gaz naturel de la France. La demande est comblée grâce aux importations soutenues, à une bonne gestion des stocks de gaz et à la sobriété énergétique.
La stratégie précoce de diversification des approvisionnements et l’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) protègent la France contre les aléas géopolitiques. Elle peut compter sur ses nombreux fournisseurs, avec à leur tête la Norvège et les États-Unis, suivis par la Russie, l’Algérie, le Qatar, les Pays-Bas et le Nigéria.
La France mise aussi sur la croissance progressive de sa production nationale de biométhane bas-carbone (9 TWh en 2023).
Graphique de la consommation totale (hors pertes) de gaz naturel par secteur
Graphique des fournisseurs de gaz de la France :
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L’approvisionnement en gaz naturel au niveau mondial
Une consommation mondiale de gaz en hausse
La consommation mondiale de gaz naturel ne cesse d’augmenter. Selon les premières estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la hausse sera de 2,5 % en 2024, principalement tirée par la région Asie-Pacifique.
Les États-Unis, la Russie et la Chine restent les principaux pays consommateurs. Mais c’est le Moyen-Orient qui affiche la consommation de gaz naturel la plus forte, rapportée à sa population. L’Europe inverse la tendance avec une baisse de 18 % de la consommation de gaz entre 2022 et 2024.
Un approvisionnement en gaz déstabilisé mais garanti
Deux pays dominent la production de gaz naturel dans le monde : les États-Unis et la Russie, suivis de l’Iran, la Chine et le Canada. En Europe, la Norvège a battu en 2024 son record de production de gaz. En 2023, la production de 4 059 milliards de m³ a pu répondre sans risques à la demande mondiale évaluée à 4 010 m³.
L’approvisionnement mondial en gaz semble donc garanti. Il est néanmoins déstabilisé par les tensions géopolitiques, notamment le conflit en Ukraine. Mais la réduction des importations de gaz russe par gazoduc a été compensée par la montée en puissance du Gaz Naturel Liquéfié (GNL), en plein boom depuis 2022. La condensation du gaz sous forme liquide facilite son stockage et son transport par voie maritime.
Classement des dix plus grands pays producteurs de gaz naturel en 2023
La volatilité des prix du gaz naturel
Malgré leur baisse prononcée par rapport à 2023, les prix du gaz naturel ont connu une augmentation progressive sur 2024.
Néanmoins, l’heure semble être à la stabilisation des prix. Les prévisions des analystes pour 2025 sont optimistes même si la prudence reste de mise, au vu de l’imprévisibilité géopolitique et économique mondiale.
Quelles solutions ou stratégies pour sécuriser l’approvisionnement en gaz ?
Diversifier les sources d’approvisionnement en gaz
L’Union européenne, et notamment la France, joue la carte de la diversification. C’est l’un des volets du plan RePowerEU annoncé en 2022 suite à la guerre en Ukraine. L’objectif ? Libérer les pays européens de leur dépendance au gaz naturel russe. La part des importations en provenance de Russie est ainsi descendue de 45 % avant la guerre à 13,3 % en 2024 pour privilégier de nouveaux pays (Norvège, Algérie, Azerbaïdjan, Royaume-Uni, Libye). Certains pays européens restent néanmoins liés à la Russie par des contrats contraignants de long terme (Hongrie, Slovaquie...)
La stratégie européenne se tourne depuis 2022 vers le gaz naturel liquéfié (GNL). Les exportations américaines vers l’Europe ont doublé entre 2021 et 2022. 2024 a été marquée par la hausse des importations de gaz russe par voie maritime sous forme de GNL.
Graphique sur l’origine des importations de gaz :
Réduire les consommations énergétiques
Les économies d’énergies participent aussi largement à la sécurisation énergétique. Une demande réduite est plus facilement couverte par l’offre d’énergies alternatives et renouvelables.
En 2022, l’Europe a ainsi volontairement décidé de réduire sa consommation de gaz naturel de 15 % afin d’anticiper un éventuel arrêt total des approvisionnements en gaz russe. Prise pour des raisons stratégiques et politiques, cette décision a aussi participé à la réduction des émissions de CO2 européennes.
Accélérer la transition vers les énergies alternatives vertes
L’Union européenne fait le pari des énergies renouvelables pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et sécuriser son approvisionnement énergétique. En 2023, les énergies renouvelables représentaient 24,5 % du mix énergétique européen, avec l’objectif d’atteindre 42,5 % en 2030. En France, leur part dans la consommation finale brute atteignait 22,2 % en 2023.
Plus globalement, la transition vers les énergies vertes s’accélère dans le monde. En 2023, plus de 560 GW de capacités d’énergies renouvelables ont été installées, dont 60 % par la Chine. Selon l’AIE, le monde pourrait passer de 4 250 GW de production renouvelable en 2023 à 10 000 GW en 2030. Une question demeure cependant : la capacité des réseaux d’énergie à intégrer cette production d’électricité et de gaz alternative.
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Moderniser les infrastructures de gaz
Le développement des énergies renouvelables, et particulièrement des gaz renouvelables et décarbonés, nécessite de moderniser les infrastructures de transport, de distribution et de stockage. L’enjeu ? Permettre l’injection dans les réseaux de nouveaux gaz verts (biométhane, hydrogène) et garantir un acheminement sécurisé et flexible vers les consommateurs.
Par exemple, le biométhane implique la multiplication des points d’injection et la création de sites de rebours pour rediriger la production du réseau de distribution vers le réseau de transport. L’hydrogène exige un maillage des territoires par des infrastructures adaptées, fiables et performantes.
Quelles perspectives pour l’approvisionnement en gaz naturel à court et moyen terme ?
Un « équilibre fragile » sous fonds de tensions géopolitiques
Si l’approvisionnement en gaz naturel semble en 2024 rassurant, l’AIE alerte dans son rapport annuel publié en octobre sur « l’équilibre fragile » du marché mondial du gaz à court terme. Les tensions géopolitiques, dominées par le conflit en Ukraine, menacent l’approvisionnement et accroissent la volatilité des prix.
En Europe, la fin du contrat de transit du gaz russe via l’Ukraine pourrait signifier 15 milliards de m³ de gaz en moins pour les pays européens en 2025. Dans le cadre de nouvelles sanctions, l’Union Européenne a également interdit à la Russie l’utilisation de ses ports pour acheminer le gaz naturel liquéfié (GNL) russe vers des destinations hors Europe.
Dans le monde, le conflit au Proche-Orient inquiète. Des impacts sur le détroit d’Ormuz pourraient déstabiliser l’approvisionnement mondial en pétrole et en GNL.
Autre sujet de préoccupation : la future politique énergétique américaine suite à l’élection de Donald Trump, fervent défenseur des énergies fossiles et du gaz de schiste.
Des incertitudes sur la demande en gaz naturel
Du côté des marchés de l’énergie, des incertitudes planent sur l’évolution de la demande en gaz naturel et l’adéquation de l’offre. La consommation mondiale pourrait s’infléchir dans les années à venir dans un contexte de transition énergétique et de développement des énergies renouvelables.
Un déséquilibre entre l’offre et la demande de gaz naturel pourrait déstabiliser les marchés et les économies. L’AIE anticipe un excès de l’offre de GNL dans la seconde moitié de la décennie et une pression à la baisse sur les prix. Déjà en 2024, les exportations américaines de gaz naturel liquéfié ont souffert de la baisse de la demande européenne et de la montée en puissance de pays concurrents (Qatar, Australie).
Une offre de gaz naturel garantie après 2050 ?
La baisse des réserves semble compromettre l’avenir du gaz naturel. Au rythme actuel, les stocks naturels peuvent couvrir 50 ans de consommation. Cependant, l’innovation technologique pourrait allonger ces délais grâce à l’exploitation de réserves de gaz dites « non conventionnelles » ou plus difficiles d’accès (gaz de schiste, réserves offshore).
Mais l’avenir du gaz devrait reposer principalement sur le gaz renouvelable et bas-carbone, avec le développement de technologies de production prometteuses (pyrogazéification, gazéification hydrothermale, power-to-gas, méthanation) et l’accélération de la production de biométhane. En France, la transition vers le gaz vert est engagée. L’objectif est ambitieux : il s’agit d’avoir un mix de gaz 100 % renouvelable et décarboné en 2050 pour atteindre la neutralité carbone.
Pour conclure ...
L’approvisionnement en gaz naturel semble aujourd’hui sécurisé en France, en Europe et dans le monde. Cependant les incertitudes géopolitiques, économiques et environnementales pèsent sur son avenir. Entre promesses technologiques, défis environnementaux et risques économiques, seules des stratégies proactives et résilientes peuvent garantir un approvisionnement en gaz sécurisé, fiable et abordable, tout en anticipant des solutions énergétiques alternatives.