Le biopétrole est-il une solution d'avenir ?
La société humaine actuelle dépend étroitement des énergies fossiles comme le pétrole. Du carburant pour les moyens de transport à la pétrochimie, les utilisations des hydrocarbures sont multiples.
Le pétrole n'est cependant pas une source d'énergie inépuisable et le coût environnemental de son exploitation est assez élevé. De ce fait, il est essentiel d'anticiper son épuisement.
Les recherches très actives à ce sujet s'orientent principalement vers des alternatives connues sous le nom de biocarburant. C'est notamment le cas du biopétrole. Beaucoup y voient le pétrole du futur. SirEnergies vous fait le point sur cette alternative au pétrole.
Le biopétrole, de quoi s'agit-il ?
Le biopétrole est une forme de pétrole fabriquée à partir d'algues microscopiques qui se nourrissent du CO2. Cette solution inédite, relayée par plusieurs médias en 2011, avait suscité un réel engouement.
Le procédé de fabrication
Le procédé de fabrication du biopétrole est des plus simples : par photosynthèse, des microalgues sont cultivées dans des tubes transparents. Elles sont ensuite récoltées et filtrées pour donner notamment une pâte.
Celle-ci par craquage à haute température et à haute pression est transformée en pétrole très similaire à celui que nous connaissons aujourd'hui. L'hydrotraitement de ce biopétrole donnera des hydrocarbures qui pourront être mélangés à d'autres carburants comme le kérosène, l'essence ou le gazole.
Le pétrole bleu de Bio Fuel Systems
Produire en accéléré et à moindre coût du pétrole tout en dépolluant l'atmosphère a séduit de nombreuses entreprises. Les premiers essais de ce nouveau procédé ont été par exemple réalisés en Espagne, plus précisément à Alicante par une usine expérimentale ouverte par Bio Fuel Systems (FBS).
Le modèle développé par cette entreprise consiste essentiellement à fournir du CO2 à des millions de microalgues prélevées dans l'Atlantique et dans la Méditerranée. Elles sont enfermées dans 400 tubes gigantesques et le gaz carbonique provenait d'une cimenterie voisine. Ces algues se développent ensuite très rapidement et les liquides obtenus dans les tubes sont filtrés pour obtenir une biomasse qui servira entre autres à la production de carburants bio.
Les microalgues à l'origine du pétrole bleu, de grands potentiels
Le choix des microalgues pour la production du biopétrole est loin d'être anodin ou hasardeux. Bien au contraire, cela est stratégique et montre d'ailleurs, comme nous le verrons tout le potentiel de ce nouveau procédé encore en phase expérimentale.
Un développement naturel
Les microalgues font partir du phytoplancton, c'est-à-dire des micro-organismes végétaux qui vivent en suspension dans l'eau et dont la biomasse est à l'origine des sédiments qui sont au fil du temps transformés en pétrole. Les microalgues sont une ressource idéale. Elles sont non seulement durables, mais faciles à faire pousser. De l'eau de mer et du soleil sont en effet amplement suffisants pour leur développement.
Nul besoin de sols fertiles ou d'engrais. Leur culture peut s'effectuer hors-sol ou dans des bassins. De quoi étouffer les critiques qui fusent à l'encontre des premières générations de biocarburant à base de plantes vivrières comme le colza, la betterave ou le blé. On les accusait en effet d'entrer en concurrence avec les ressources alimentaires et de participer activement à la déforestation et à la dégradation des terres.
Une réduction des gaz à effet de serre
Autre avantage, les microalgues sont composées à 60 % de sucre et sont donc parfaitement adaptées à la production du butanol et du bioéthanol par simple fermentation. Le bioéthanol peut par exemple être mélangé aux carburants conventionnels pour réaliser un biocarburant à base d'algues.
De plus, cette production de biopétrole à partir des microalgues pourrait réduire la teneur en gaz carbonique de l'atmosphère. Ces plantes peuvent en effet capter le CO2 de l'air et l'utiliser comme source d'énergie lors de la photosynthèse.
Une très grande productivité
Les microalgues ont également une meilleure efficacité photosynthétique comparée aux plantes. Leur productivité en biomasse représente près du double de celles-ci, sans oublier qu'elles ont une croissance continue. Les notions de saison ne sont alors plus pertinentes puisqu'elles peuvent produire du biocarburant toute l'année.
En ce qui concerne la productivité, ExxonMobil estime qu'un hectare permet de produire en moyenne 6 000 litres d'huiles de palme, mais plus de 14 000 litres d'algocarburant.
TotalEnergies, un autre industriel conscient du potentiel des microalgues, entend porter leur rendement à 60 000 litres par hectare par an.
Un procédé de fabrication à améliorer
Si produire du bio carburant à partir de microalgues tout en filtrant le gaz carbonique de l'atmosphère est indubitablement une excellente idée, le procédé actuel est encore loin d'être optimal. Tout d'abord, il est assez gourmand en énergie.
C'est d'ailleurs pour cela que Jean-Philippe Steyer, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), se demande si le biopétrole pouvait réellement être considéré comme le domaine de prédilection de l'exploitation des algues.
De plus, même si plusieurs projets semblent être prometteurs et parviennent effectivement à produire du biopétrole, cette source de carburant biologique est bien trop onéreuse pour envisager une commercialisation à grande échelle. Son coût est en effet 100 fois plus élevé que celui du carburant traditionnel. Bien évidemment, les prix sont amenés à baisser et pourront éventuellement être compétitifs dès que le procédé sera mieux maîtrisé et la production pourra se faire en grande quantité.
De même, d'autres défis restent à relever dans le cadre de la fabrication de carburants biologiques. Les microalgues produisent de nombreuses molécules d'intérêt comme les huiles qui peuvent également être utilisées pour la fabrication de biocarburant.
Il s'agira donc de cultiver en quantité les microalgues sans pour autant limiter leur production de molécules d'intérêt. Certaines recherches ont en effet montré que les lipides ne sont produits par les algues qu'en condition de stress. Or dans ce cas, ces plantes ne se reproduisent plus.
Dans cette optique, des recherches s'orientent actuellement vers la sélection variétale et l'utilisation des outils de génétique moléculaire. Cela va permettre de sélectionner des souches d'algues plus intéressantes qui pourront être cultivées en quantité durant toute l'année.
Même là, la transformation des huiles en biocarburant nécessite une phase d'extraction particulièrement énergivore. L'un des plus grands défis pour les chercheurs est donc d'optimiser toutes ces étapes de production de biopétrole afin de les rendre compétitives par rapport aux énergies fossiles.
S'il tient ses promesses, le biopétrole peut être une excellente alternative aux énergies fossiles encore prépondérantes. Bien évidemment, il faut que ces procédés soient assez mûrs pour soutenir un système économique viable et une transition écologique efficace. Des recherches actives sont toujours en cours pour améliorer le procédé de transformation de microalgues en pétrole et son rendement.
SirEnergies s’est posé la question s’il était possible d’alimenter tout un pays en énergie renouvelable. N’hésitez donc pas à lire notre article à ce sujet.