Dans le paysage énergétique actuel, il est difficile de faire l’impasse sur la biomasse. Hier énergie reléguée au passé, elle se conjugue désormais au présent.
Suite à la 21e conférence des parties (COP 21) de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), la France a pris des engagements pour atteindre la neutralité carbone en 2050, et s’est engagée sur une trajectoire définie dans le cadre de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
L'ADEME, à travers le Fonds Chaleur, accompagne les collectivités dans la mise en œuvre de projets de chaleur renouvelable, notamment biomasse énergie. De même dans le cadre du plan de relance de l’industrie, l’ADEME a lancé un fond décarbonation de l’industrie qui se concrétise par de l’aide à l’investissement à travers des appels à projets BCIAT (Biomasse Chaleur Industrie Agriculture et Tertiaire).
Depuis 12 ans, le Fonds Chaleur a permis d’aider plus de 6 000 installations d’énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) grâce à 2,6 milliards d’euros d’aides, ayant généré 9,4 milliards d’euros d’investissements.
SirEnergies vous invite donc aujourd’hui à vous intéresser de plus près à la biomasse pour savoir précisément de quoi on parle.
Pourquoi la biomasse est une énergie renouvelable ?
Le bois de feu, énergie primaire des origines
Depuis la découverte du feu à la préhistoire, la biomasse est la forme d'énergie la plus ancienne utilisée par l'homme.
Au XVIIIe siècle, le “bois de feu” était le principal combustible utilisé dans les maisons pour le chauffage et la cuisson. Dès lors son utilisation deviendra intensive jusqu’à la première révolution industrielle.
L’arrivée du pétrole fera ensuite oublier la biomasse qui ne réapparaîtra qu’en 1970 avec les premières prises de conscience des risques de pollution générée par les énergies fossiles.
Depuis, le bois-énergie a diversifié ses usages et est maintenant utilisé dans des chaufferies pour produire de la chaleur et dans des installations de cogénération pour produire simultanément de l'électricité et de la chaleur.
La biomasse sur Terre
Au niveau mondial, la biomasse représente 1 000 milliards de tonnes réparties entre les forêts, les océans et les lacs. On estime que sur les 160 milliards de tonnes par an de biomasse sèche utilisée, 50 % proviennent des forêts et 36% des océans.
La surface forestière est estimée à 30% des terres de la Terre ce qui équivaut à un peu moins de 40 millions de kilomètres carrés soit environ 5 500 terrains de football. Ce qui fait du bois ou biomasse une source d'énergie renouvelable très importante.
Aujourd'hui la biomasse représente 59% des énergies renouvelables mondiales et permet en moyenne d’économiser l'équivalent de 350 mille tonnes de pétrole et d'éviter l'émission de 750 mille tonnes de CO2 dans l'atmosphère.
Quelle est la part de la biomasse dans la consommation mondiale d’énergie ?
La biomasse, matière organique protéiforme
La biomasse est définie comme un ensemble de matières organiques végétales ou animales pouvant se transformer en énergie. Ces matières organiques, dites biomasse, se classent en trois catégories :
- La matière solide (bois, paille, végétaux, déchets agricoles comme la canne à sucre et même les ordures ménagères organiques) ;
- La matière liquide (huiles végétales) ;
- La matière gazeuse (biogaz).
Les valorisations énergétiques de la biomasse
Ces différentes matières organiques peuvent en pratique générer trois types d’énergie en fonction des technologies utilisées :
- La chaleur,
- L’électricité,
- La force motrice de déplacement.
La supposée neutralité carbone de la biomasse
La valorisation énergétique de la biomasse peut conduire à la réduction de la dépendance au pétrole ou au gaz. Cependant, il ne faut cependant pas oublier que le pétrole et le gaz naissent dans les profondeurs de la Terre d'une transformation de la matière organique de plantes ou d'animaux morts.
Leur genèse s'étale sur des millions d'années et nécessite des conditions de pression et de température particulières. L'utilisation directe de la biomasse, sur un cycle de renouvellement plus court que le gaz ou le pétrole, permet donc, en quelque sorte, de court-circuiter le cycle très long de formation des énergies fossiles en exploitant immédiatement son potentiel énergétique.
C’est pourquoi, on qualifie la biomasse d’énergie propre ou verte car le CO2 qu'elle rejette correspond à celui précédemment absorbé par les végétaux lors de leur croissance. Cependant la biomasse énergie n’est pas, par nature et par principe, neutre vis-à-vis du climat. Son bilan carbone dépend du type de biomasse considéré, du contexte territorial, de la capacité du territoire à séquestrer du carbone sur le temps court et le temps long.
L’utilisation énergétique de biomasse est généralement associée à l’idée de neutralité carbone, par principe. Or en pratique la biomasse est diverse - solide, liquide ou gazeuse - ses origines multiples - coupe d’arbre, éclaircie de forêt, déchet de scierie, élagage de haies bocagères, etc. - et sa neutralité carbone supposée dépendent de son utilisation.
Il faudrait distinguer la biomasse de cycle court et celle de cycle long. Par exemple pour les pailles des céréales, les émissions de CO2 sont supposées être compensées par la croissance des plantes à l’échelle de l’année.
Par contre les stocks de bois présents dans les arbres des forêts sont le résultat d’années voire de siècles de croissance des arbres. Couper ces arbres est en revanche très rapide. Il peut donc y avoir un déséquilibre fort entre croissance et prélèvement.
L’hypothèse de neutralité carbone de la biomasse est acceptable pour la biomasse de cycle court mais elle est beaucoup moins évidente pour le bois de cycle long.
Biomasse - Quelle est la situation en France et en Europe ?
Selon le baromètre biomasse solide 2021 de EurObserv’ER, la France (DOM inclus) est le deuxième pays européen producteur d’énergie primaire et consommateur de biomasse solide, derrière l’Allemagne. Elle est neuvième en termes de production d’électricité brute, et quatrième pour la production de chaleur brute. Elle est aussi la deuxième plus grande consommatrice de chaleur.
Au niveau de l’UE des 27 en 2020, la production d’électricité biomasse solide est de 82,6 TWh et la consommation de chaleur biomasse solide est de 76,4 Mtep.
Biomasse - Quelle est la source principale en France ?
La forêt française - Un patrimoine en accroissement constant
La forêt française se porte bien. La forêt est la première énergie renouvelable utilisée en France.
Le gisement forestier est préservé car les prélèvements de bois sont inférieurs à l’accroissement naturel de la forêt. Le volume de bois en forêt augmente donc tous les ans :
- Depuis 1830, la forêt est en croissance continue, elle croît actuellement de 80 000 h par an soit l’équivalent de 3,5 fois la forêt de Fontainebleau ;
- En 1908, elle représentait 10 millions d’hectares, aujourd’hui la forêt représente 17 millions d’hectares, soit un tiers du territoire national et est la 4e forêt européenne en surface.
Cette forêt, représentée par des surfaces boisées et des peupleraies, est composée d’un tiers de résineux et de deux tiers de feuillus. Le capital sur pied est estimé à 2,8 milliards de mètres cubes.
Les usages du bois en France
En France, les forêts sont exploitées principalement pour 3 usages différents. On distingue donc essentiellement 3 catégories de bois :
- Le bois d’œuvre (20 Mm3, 36%) pour la construction et la fabrication de mobilier ;
- Le bois d’industrie (10 Mm3, 18%) pour la fabrication industrielle de papier et de panneaux ;
- Le bois-énergie (26 Mm3, 46%) pour la production de chaleur et d’électricité.
Le bois énergie et ses différentes formes
Le bois-énergie est livré sous forme de bûches ou de granulés qui sont des agglomérés de sciure ou de plaquettes sous forme de bois déchiqueté qui sont particulièrement utilisés dans les grandes installations de combustion du bois quelle que soit la forme de biomasse.
Il s'agit de transformer la biomasse pour satisfaire des services énergétiques qui sont soit de la chaleur ce qui est le plus commun soit de l'électricité ou encore des biocarburants qui permettent de satisfaire une partie de notre mobilité.
Les origines du bois-énergie sont :
- Forestière (forêt et sylviculture),
- Bocagère ou agroforestière (haies, bosquets, vergers, etc.),
- Paysagère (entretien des parcs et jardins, etc.),
- Industrielle (sous-produits issus de la transformation du bois),
- Déchet (bois en fin de vie).
Les principales formes de bois-énergie (26 Mm3) :
- La bûche (22,5 Mm3), de bois traditionnel ou de bois densifié, qui mesure entre 20 cm et 30 cm, est utilisée dans les poêles, inserts ou chaudières du secteur domestique.
- La plaquette et le broyat (2,5 Mm3) sont utilisés essentiellement dans le secteur collectif et industriel dans des chaudières spécifiques pour le chauffage.
- Le granulé de bois (1 Mm3), qui est un produit normalisé, sec, de 3 à 4 cm de long et de 6 mm de diamètre, fabriqué par compactage de sciures ou d'autres résidus broyés, est utilisé dans des poêles ou des chaudières spécifiques, pour le chauffage du particulier ou dans des installations collectives.
En 2020, la production primaire de biomasse solide s’élève à 113 TWh et se répartit ainsi entre les différentes formes de biomasse :
- 93 TWh de bois sous forme de bûches ou plaquettes
- 8 TWh de granulés
- 8 TWh de liqueur noire
- 4 TWh de résidus agricoles et alimentaires
La biomasse, première source d’énergie renouvelable
La production d’énergie renouvelable en France
En France, la principale filière d’énergie renouvelable est la biomasse solide.
En effet, le bois biomasse représente plus d’un tiers de la production d’énergie renouvelable.
Cette énergie renouvelable est utilisée principalement pour produire de la chaleur : ⅔ de la chaleur renouvelable produite est issue de la biomasse.
Contrairement à une idée reçue, la biomasse devance l'énergie hydraulique dans le palmarès des énergies renouvelables. Il est vrai cependant que l’une permet de produire principalement de la chaleur quand l’autre produit de l’électricité.
En effet, la biomasse solide est majoritairement (92 %) destinée à produire de la chaleur, du fait d’un rendement supérieur à celui observé lorsqu’elle est utilisée pour produire de l’électricité. Il s’agit de l’énergie renouvelable la plus répandue en France dans le secteur résidentiel.
Le bois, une énergie locale et peu émettrice de CO2
Le bois-énergie est majoritairement un combustible produit et consommé localement, sans long transport, ce qui le rend vertueux.
Les émissions de CO2 pour la production et le transport d'une tonne de bois-énergie s’élèvent à 28,6 kg dont :
- 33% transport
- 27% débardage
- 20% exploitation
- 18% broyage
- 1% déplacements personnels pour le suivi de la production
Comparativement les émissions de CO2 dégagé par une tonne équivalent pétrole brûlée en kg équivalent carbone sont de :
- plus de 1 000 kg pour le charbon,
- plus de 800 kg pour le pétrole,
- plus de 600 kg pour le gaz.
Le bois-énergie, une industrie dynamique
Le coût du combustible bois est stable et compétitif par rapport aux énergies fossiles, ce qui fait du bois un combustible intéressant pour le chauffage collectif. Près de 25% de l'énergie fournie par les réseaux de chaleur provient du bois-énergie
Par exemple une chaufferie bois de 2,5 à 3 MW consommant 4 000 tonnes de bois par an peut alimenter l'équivalent de 1 500 logements. Une chaufferie bois de 300 kW consommant 200 tonnes de bois par an peut alimenter une maison de retraite de 100 résidents.
C’est ainsi qu’aujourd’hui on dénombre :
- Plus de 7 000 installations collectives industrielles et tertiaires de plus de 50 kW ;
- Plus de 8 000 MW de puissance thermique installée ;
- Plus de 650 MW de puissance électrique installée, soit l’équivalent d’une tranche de centrale nucléaire.
Le bois-énergie est devenu populaire et un secteur d’activité dynamique :
- Plus de 300 000 ménages se sont équipés en 2020 d’un appareil récent de chauffage biomasse ;
- 7 millions de ménages environ sont équipés d’un appareil de chauffage biomasse ;
- Plus de 3 milliards d'euros d'activité générée dans le secteur domestique ;
- Et environ 1,5 milliard d'euros d'activité générée dans le secteur collectif et industriel.
Aujourd’hui, le bois énergie c’est 800 000 tonnes de bois en fin de vie valorisées en chaufferie et environ 9 millions de tonnes de CO2 évitées par l’usage du bois énergie.
Loin d’être une énergie du passé, la biomasse est au contraire identifiée aujourd’hui comme une énergie renouvelable d’avenir permettant de cumuler un ensemble d’avantages :
- La biomasse bien gérée est une énergie produite localement et disponible partout,
- La biomasse est une énergie quasi inépuisable si bien gérée,
- Le cycle de vie de la biomasse permet un bilan carbone neutre sur une échelle de temps humaine,
- Le prix de la biomasse est beaucoup plus stable que celui des énergies fossiles,
- Le développement de la biomasse énergie est générateur d’emplois dans nos régions.
La biomasse-énergie est donc une énergie d’avenir dont la France est particulièrement bien dotée et qui répond aux enjeux de la transition énergétique.
Depuis plus d’une décennie maintenant, un effort important est mené par les pouvoirs publics pour inciter les acteurs économiques à investir dans cette énergie d’avenir.