Pourquoi l'énergie est-elle un enjeu majeur aujourd’hui et demain ?

il y a un mois   •   7 minutes de lecture

Table des matières

Le 22 octobre est la Journée Mondiale de l’Énergie. L’objectif est double : sensibiliser au développement des énergies vertes et renouvelables, tout en garantissant l’accès de tous à l’énergie. 

L’énergie est au cœur de nos vies. La Révolution industrielle a marqué un tournant dans l’histoire de l’humanité. Éclairage, cuisson, chauffage, déplacement, production, numérique… : l’énergie est partout. Elle est la source essentielle du développement économique, social et humain. Mais ce qui facilite notre quotidien pourrait aussi causer notre perte. 

Avec plus de 8 milliards d’hommes sur Terre, la consommation d’énergie mondiale n’a cessé d’augmenter. En 2023, elle a atteint un niveau record de 619,6 exajoules (EJ). Principalement couverte par les énergies fossiles, la consommation d’énergie dérègle le climat et l’environnement. Pétrole, gaz naturel et charbon s’épuisent. 

À l’aube de la 29ème COP sur le changement climatique, quel est le contexte énergétique ? Pourquoi l’énergie est-elle un véritable enjeu pour l’Homme ? Quelles sont les solutions pour y répondre ? 

Notre analyse. 

Un bilan énergétique alarmant

L’année 2023 a été l’année de tous les records énergétiques dans le monde, malgré les progrès des pays européens en matière de production et de consommation. 

Une consommation énergétique en hausse continue

Depuis les années 1970, la consommation mondiale d’énergie primaire ne cesse d’augmenter. Après un répit en 2020 dû à la crise sanitaire, les chiffres poursuivent leur course en avant

En 2022, la consommation énergétique mondiale a atteint près de 168 000 TWh, soit quatre fois plus qu’il y a 60 ans ! En 2023, elle a encore augmenté de 2 % malgré la baisse de la consommation en Europe de 2,2 %. La Région Asie-Pacifique a compensé avec une hausse de 5 %. 

L’accélération du numérique pourrait encore aggraver la situation énergétique dans les années à venir. Rien qu’en France, l’ADEME et l’ARCEP estiment dans un rapport publié en 2023 que la consommation d’énergie liée au numérique pourrait augmenter de 4 % en 2030 et de 79 % en 2050 ! 

Consommation mondiale d'énergie primaire par énergie

Source : Calculs SDES, d’après les données de l’AIE_ Ministère de la transition énergétique

De fortes inégalités énergétiques mondiales

Plus de 90 % des personnes ont accès à l’électricité dans le monde. Si l’accès à l’énergie se démocratise, les inégalités mondiales restent fortes entre pays. 

En Amérique du Nord, la consommation d’énergie annuelle s’élève en moyenne à 230 GJ par habitant. Elle est moitié moins élevée en Europe, avec 122 GJ. Mais en Afrique, elle est inférieure à 15 GJ...

Moyenne de la consommation d'énergie primaire par habitant dans différentes régions du monde

Source : bp Statistical Review of World Energy 2022 - Graphique : Deklic

Une prédominance des énergies fossiles

Malgré les progrès des énergies décarbonées et renouvelables, les énergies fossiles polluantes représentent toujours 81,5 % du mix énergétique mondial en 2023. 

Le pétrole, le charbon et le gaz naturel restent les trois principales sources d’énergies dans le monde. En 2023, elles représentent respectivement 31,7 %, 26,5 % et 23,3 % du mix énergétique mondial. 

 

Composition du mix énergétique mondial en 2023 (en %)

Source : Energy Institute - Statistical Review of World Energy - Graphique : Selectra

Les enjeux de l’énergie au XXIème siècle

Les chiffres records de l’énergie inquiètent. L’augmentation de la consommation d’énergie, d’origine majoritairement fossile, n'est pas sans conséquence sur l'environnement. L’épuisement des stocks énergétiques pourrait aussi menacer le développement économique et humain. 

Des enjeux climatiques et environnementaux

Encore dominante dans le monde, la combustion des énergies fossiles est très polluante. En 2023, le secteur énergétique a rejeté 35,1 milliards de tonnes de CO2 dans l’atmosphère, en hausse de 1,6 % par rapport à 2022. 

Ces gaz à effet de serre sont un facteur majeur du réchauffement climatique. 2023 a été l’année la plus chaude jamais mesurée. La température moyenne a été supérieure de 1,19°C par rapport aux moyennes observées au XXème siècle

Les conséquences des changements du climat se font déjà sentir partout dans le monde : fonte des glaces, élévation du niveau des mers, sécheresses, inondations, désertifications, événements météorologiques extrêmes, etc. 

Pour les experts du GIEC, l’augmentation de la température atteindra sans nul doute +1,5°C en 2040. Développer des sources d’énergies alternatives, renouvelables et décarbonées, est incontournable pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, préserver l’environnement et contenir la hausse des températures. L’enjeu est fort : à moyen terme, c’est la vie sur Terre dans toute sa biodiversité qui est menacée.



Source : Anomalies de température à la surface des terres et océans (en °C par rapport à la moyenne du 20e siècle) - Statista

Des enjeux économiques et humains

Autre sujet d’inquiétude : l’épuisement des sources d’énergies fossiles. Avec la surconsommation actuelle, le gaz naturel et le pétrole disparaîtront avant la fin du siècle. Les réserves de charbon et d’uranium pourraient tenir une centaine d’années. 

La réduction de l’offre d’énergie se traduirait par la hausse des prix, rendant son accès plus difficile. Et que deviendrait l’être humain confronté à des pénuries d’énergie ? Une simple coupure d’électricité bouleverse déjà nos vies occidentales. L’épuisement des énergies fossiles, socles de notre modèle économique, numérique et sociétal actuel, serait une catastrophe. Par exemple, en France, sans gaz naturel, plus de la moitié des foyers vivant en appartement ne pourraient plus se chauffer. Sans pétrole, plus de 95 % des moyens de transport s’arrêteraient. Sans électricité, 100 % des entreprises et ménages seraient privés d’éclairage. 

Plus largement dans le monde, le développement économique et humain est fortement corrélé aux conditions d’accès à l’énergie. L’accès à des services énergétiques fiables, durables et modernes est une des conditions du développement, comme énoncé dans les objectifs de développement durable (ODD) de 2015.

Dans une vision dystopique sombre, l’épuisement des ressources fossiles pourrait ainsi sonner la fin de notre monde moderne et provoquer des conflits autour de l’énergie. 

Énergie : quelles solutions pour demain ? 

Face aux enjeux environnementaux, climatiques, économiques et humains, il est urgent d’agir sur l’énergie dès aujourd’hui pour protéger le monde de demain. La COP 28 a marqué un changement de paradigme. Pour la première fois, « le début de la fin de l’ère des énergies fossiles » a été évoqué. L’objectif prioritaire : réduire la hausse des températures à 1,5°C, dans la lignée de l’Accord de Paris. 

Réduire les consommations énergétiques

La COP 28 a validé en 2023 un premier objectif : doubler les améliorations en matière d’efficacité énergétique afin de réduire les consommations d’énergie à la source. 

Concrètement, il s’agit de soutenir la sobriété et l’efficacité énergétique dans les secteurs résidentiels, tertiaires et industriels (isolation thermique, installation d’équipements moins énergivores…) 

Adoptée en 2024, la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments va dans ce sens. Elle impose que tous les bâtiments neufs en Europe soient à zéro émission à partir de 2040. En France, les mesures de transition énergétique se multiplient ces dernières années pour atteindre la neutralité carbone en 2050 : décret tertiaire pour suivre l’évolution des consommations énergétiques du secteur tertiaire, réglementation environnementale RE 2020, certificats d’économie d’énergie (CEE)… 

Sortir des énergies fossiles

Pointés du doigt pour leurs émissions de gaz à effet de serre, le charbon et le pétrole sont dans le viseur des États. L’objectif ? Sortir de la dépendance à ces sources d’énergies avant leur épuisement. 

L’Europe est l’un des fers de lance du combat. Deux mesures symboliques ont d’ores et déjà été actées : l’interdiction à partir de 2035 de la vente des véhicules neufs à essence et diesel, et la fin des chaudières fossiles en 2030.

Côté charbon, son abandon progressif a été une des conclusions marquantes de la COP 26 en 2021 avec la création de la Powering Past Coal Alliance. 137 pays, villes et organisations s’engagent pour la suppression des centrales électriques au charbon ne disposant pas de système de captage et de stockage du CO2. 

Développer les énergies renouvelables

Sortir des énergies fossiles exige de trouver une alternative. Les énergies renouvelables sont au cœur de la transition énergétique. Lors de la COP 28, les parties prenantes ont pris l’engagement de tripler les capacités ENR à l’échelle mondiale

L’élan a déjà été donné en Europe dans les années 2010. La troisième version de la directive sur les énergies renouvelables a renforcé l’ambition. Dans le cadre du programme Fit for 55, elle porte à 42,5 % la part des énergies renouvelables dans la consommation brute d’énergie européenne d’ici à 2030. 

Plus généralement dans le monde, les énergies renouvelables ne cessent de croître. L’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) a relevé une croissance de 86 % de leur capacité en 2023. 

L'énergie solaire photovoltaïque a notamment connu une croissance exceptionnelle mondiale de 24,2 %. Si l’hydroélectricité reste l’énergie la plus exploitée et la plus efficace, l’énergie éolienne représente 24 % du développement des énergies renouvelables. Les bioénergies (biomasse, biocarburants, réseaux de chaleur…) et la géothermie ont connu quelques ralentissements.  

Les énergies renouvelables souffrent néanmoins d’une répartition inégale dans le monde. « La concentration géographique et technologique menace de creuser le fossé de la décarbonisation » selon l’IRENA. L’organisation appelle à augmenter massivement les financements et à renforcer la collaboration internationale. 

Décarboner les énergies fossiles

L’amélioration de l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables sont cependant trop lents pour compenser l’augmentation globale de l’activité économique et humaine. Face à l’urgence climatique, certains scientifiques soutiennent le développement complémentaire d’une technologie émergente : le captage du CO2 dans l’air, pour le stocker, le valoriser ou le réutiliser.

L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) estime que ces technologies permettraient de réduire de 15 % les émissions de gaz à effet de serre des énergies fossiles. L’organisation vise un objectif de 7,6 GT de CO2 capturés chaque année à partir de 2050. 

Néanmoins cette technologie reste controversée. Son principal défaut selon ses détracteurs ? Soutenir le maintien de projets d’énergies fossiles. Le stockage du CO2 dans l’environnement pose aussi question. 

L'épuisement des ressources, les changements climatiques et leurs conséquences sur nos sociétés font de l'énergie un enjeu majeur, et ce dès aujourd’hui. L'amélioration de l'efficacité énergétique et le développement massif des énergies renouvelables sont indispensables pour préserver l’Homme et son environnement. L’être humain est à la croisée des chemins. La révolution énergétique est la condition sine qua non pour assurer la survie de nos sociétés. 

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